6ème jour. Mardi 15 décembre. Port-Louis - Souillac -

5h00. Le frisson du réveil...
Tant d'énergie dépensée pour la réussite d'un événement qui dépend entièrement d'un moyen de transport que nul ne possède, encore.
Le temps qui nous sépare du départ de la roulotte est limité, et les marges très courtes. La réussite d'un événement dépend également de tous les paramètres imaginés, mis en place, et réfléchis pour qu'au moindre écart, l'organisateur ait la réponse. Ce travail de l'ombre, nul ne le voit, nul ne le connaît mais il est le frisson du chef de projet. Tout cela est un métier qui doit permettre la réussite d'une fête sans que nul ne saisisse les pannes, les bégaiements. Le cerveau fume en permanence et ne connaît pas de repos, pas de RTT.
Aussi, lorsque le jour décline, je reprends mes notes, mes observations et progresse dans la logistique d'une fête à venir, habitée par elle. Et la nuit, la porte s'ouvre sur des images gardiennes du trésor... La respiration, le regard, tout en soi est porté au plus haut degré de ce futur proche - féerique. Du silence jailissent les chants, des champs retentissent les guitares et le vide se pare d'un son et lumière enchanté. Le regard du "créateur" doit peindre cette lumière en permanence.
Car même l'aveugle doit saisir la magie du spectacle à venir.
Mais ce matin, j'apprends qu'Olivier François ne peut confirmer le rendez-vous alors que je suis déjà à Port-Louis avec Dinand. D'un pas lent, presque lourd, nous déambulons dans les rues... ici et là.Nous décidons de visiter le moulin, de retourner au marché, de savourer un lait caillé ; et puis, de ce même pas ébranlé, nous nous rendons au ministère avant de quitter Port-Louis pour une destination inconnue.
Sandhya qui coordonne tous les rendez-vous tente de joindre de nouveau Olivier François pour fixer la réunion (je précise que rien n'avait été fixé encore et simplement "proposé"). Nous nous accordons sur mercredi 16, à 10H00.
Un jour de plus d'attente, trois jours avant le départ pour la France, le coeur est solidement accroché, waouh !
Une fois sortis des bureaux, une question se pose : où allons-nous maintenant ? Quelle partie de l'Ile Maurice reste-t-il à découvrir ?
Direction le sud. Souillac.
J'ouvre le guide et me renseigne sur les sites à visiter. Oui ! Bois Chéri et sa fabrication de thé. Souvenez-vous dans l'avion, les parfums enivrants et les souvenirs d'enfance.
La météo varie d'un kilomètre à l'autre, brouillard, pluie, soleil, inégalement répandue. Nous traversons l'Ile du Nord au Sud en passant par "La Britannia Sugar Estate" et ses cheminées fumantes, Saint-Aubin, Bois Chéri (ci-dessous, le thé).Les paysages de canne à sucre s'étendent et rappellent l'importance de cette économie, malheureusement malmenée de nos jours. Les exploitations ferment les unes après les autres broyées par l'économie de marché. Alors, il reste partout ces cheminées commme témoin de l'histoire.
En nous approchant de Souillac, je demande à visiter le musée du poète mauricien Robert Edward Hart ainsi que le cimetière où il repose et où cohabitent les marins. Les portes fermées vont s'ouvrir grâce à l'immatriculation de la voiture (ministère) et la visite se déroule dans un cadre privé. La maison, plusieurs fois détruite par les cyclones, est construite en maçonnerie de corail. A l'intérieur, l'homme, d'origine franco-irlandaise aimait à se recueillir et à recevoir. Ses poèmes écrits en français aussi bien qu'en anglais furent salués par l'académie française et la couronne britannique. Par la fenêtre ouverte, la mer agitée me rappelle nos côtes bretonnes et plonge le visiteur dans une atmosphère propice à la solitude, écrire et ne jamais sécher car ici, l'encre semble couler à flot.Le spectacle devient grandiose lorsque vous pénétrez le cimetière marin. Par jour de tempête, les tombes grignotées par l'érosion, se vident de leurs marins, et jettent loin devant elles, les corps déchiquetés.Tant est si bien que vous pouvez apercevoir un tibia prendre la poudre d'escampette... La scène est encore plus effrayante lorsqu'un couple de merle se pose sur une croix dans ce plein silence rompu par les vagues et les cris stridents.
Le soleil est au zénith... tout en soi écoute le bruit sourd et avance prudemment entre les tombes et les pierres éparses, à la recherche d'un nom, d'un corsaire breton...
Et la Bretagne distante de plus de 9 454 km dessine le sud de l'Ile.La conversation du silence, ses cris et morts nous conduit à la "roche qui pleure". Ce promontoire basaltique fouetté par la mer, émet un sanglot permanent d'où son nom. Marcher sur la roche donne le vertige de la Bretagne...La visite se poursuit et nous continuons de longer le littoral avant d'atteindre les chutes de Rochester.Au terme de la journée, notre regard se pose sur la plage de Riambel où les femmes vêtues de sari achèvent leur dernière danse.Enfin, un crachin mauricien me fait un rapide clin d'oeil avant de baisser le rideau...

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