"Le voyage est une espèce de porte par où l'on sort de la réalité comme pour pénétrer dans une réalité inexplorée qui semble un rêve."

Guy de Maupassant.

A Paris, le jour décline et partout les lumières s'éveillent, rieuses face au froid. La porte d'embarquement voit passer des visages sans sourire, en harmonie avec dehors. Mais en dedans, la mélodie des voix invite à entrer dans la danse...

A 16h20, l'oiseau se dirige sur une piste trempée, les visages se blotissent contre le hublot et cherchent dans l'ombre de la Tour Eiffel, le souvenir de vacances... A ma droite, un homme quitte tout, la France,la vitesse, le travail pour une autre vie... là-bas, à 9 454 kilomètres.

L'oiseau volera 11 heures durant, traversera la nuit, survolera l'Afrique, l'Egypte, l'Ethiopie,la Somalie et gardera mes yeux ouverts jusqu'à toucher la lune que nous frôlons d'un battement d'aile. Les films s'enchaînent, 4 au total, en français, hindi, anglais... Madagascar est en vue. Quelques kilomètres nous séparent de ces terres toutes confrontées à des histoires douloureuses où l'homme, pillé, ligoté, menoté, a rêvé la liberté.
Et l'océan Indien murmure à celui qui ne dort pas, l'histoire de ces navires en route vers l'Inde.
05h00 du matin, les effluves de thé caressent mes narines... Ce thé qu'adolescente je goûtais et qui provenait de Bois Chéry. Lui aussi volait plus de 11 heures en direction de la France pour que cette Ile pas plus grande qu'un 1/3 du département du Finistère, me révèle ses trésors...
Le thé, une histoire d'amour qui réveille mes souvenirs les plus lointains.
Oui, c'est à mes grands-parents que je pense en voyant les réacteurs s'affoler, et d'un sourire complice, lorsque l'avion quitte la piste d'envol, je les remercie du plus profond de mon être, tandis que des larmes, ou la pluie, glissent le long du hublot.
ça y est... le passé enjambe le présent pour écrire le futur. Cela ne doit exister qu'une seule fois dans une vie,
cette fois est arrivée... je devrais fermer les yeux, mais la réalité me retient.